Comment choisir un purificateur d'air?
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Entre la désinformation politique et le marketing commercial, savoir quels sont les critères pertinents pour choisir un purificateur d'air correspondant à ses besoins est une véritable gageure. Dans cet article nous vous détaillerons les critères déterminants pour vous permettre de réaliser les meilleurs choix.
Temps de lecture : 20mn.
2. Technologie d'assainissement de l'air
1. Quels sont les polluants
L'assainissement de l'air est l'ensemble des moyens pour réduire la quantité de polluants dans l'air. Ces polluants peuvent être de différents types, et tailles, correspondant à des moyens de lutte propres :
- Les gaz tels que le monoxyde de carbone (CO), le radon, les aldéhydes, ou l'ozone (O3) sont beaucoup trop petits pour être filtrés par des moyens grands publics, seule l'évacuation par l'aération naturelle (ouverture de fenêtres) ou mécaniques (VMC) est efficace.
- Les particules fines inactives telles que les poussières, fumées, composés organiques volatils (CoV), et pollens sont capturables par les filtres de purificateurs d'air mais sont fonction des normes de filtres plus ou moins chers et aux capacités de filtrations corrélés au prix.
- Les bioaérosols tels que les aérosols respiratoires contenant les virus et bactéries, les spores de moisissures et champignons, les aérosols produits par l'évaporation ou l'émulsion. Ces aérosols ont en commun de transporter ou d'être des éléments biologiques sensibles aux rayonnement UV et certains autres biocides ; et sont aussi capturable par des filtres aux normes plus mesurées.
Visualisation des catégories de particules aéroportées (contaminants biologiques, ou particulaires minéraux ou organiques, ou gazeux...) par nature et taille (en micromètres ; μm)
2. Technologie d'assainissement de l'air
Les purificateurs d'air proposent deux types principaux d'assainissement de l'air : l'émission de rayonnement (direct ou indirect) et la filtration.
Le principe des technologies à rayonnement est soit de produire des sous-composés, soit charger électriquement les particules, soit perturber l'ADN des éléments biologiques des aérosols, et sont souvent cumulés à de la filtration :
- La photocatalyse : On fait passer de l'air à travers une zone recevant des UV sur un catalyseur en dioxyde de titane, ce qui décompose les molécules polluantes en plus petits composés inoffensifs tels que de l'eau, du CO2, de l'oxygène, mais aussi en sous-produits soit mal étudiés, soit directement dangereux. A éviter.
- L'ozonation : Avec des UV dans l'appareil, on produit et diffuse de l'ozone (O3) à travers la pièce et au contact l'O3 décompose les autres aérosols. L'ozone en lui-même est irritant, et les sous-composés produits peuvent aussi être dangereux, et devant donc être parfaitement dimensionné et cumulé à une ventilation. A éviter.
- Le plasma froid : On fait passer de l'air dans l'appareil où ce flux d'air est traversé de radicaux libres qui décomposent les molécules complexes. Coût trop élevé et risques sur les sous-produits. A éviter.
- L'ionisation : Avec des UV dans l'appareil, on décharge électriquement des atomes des particules circulant au travers du purificateur, et par répulsion/attractions vont amener des particules à se coller sur une surface inerte. Les UV réagissant aussi avec l'oxygène, il y a aussi une production d'ozone néfaste ; de plus l'ionisation peut augmenter l'adhérence des aérosols respiratoires dans le système respiratoire. A éviter.
- L'électrofiltration : A l'entrée de l'appareil on décharge magnétiquement les particules du flux d'air, puis elles sont attirées sur des plaques chargées positivement. Capture l'entièreté des polluants aériens, nécessite un entretient plus fréquent et est relativement cher et rare, mais est sans danger et efficace.
- Les UVC internes : On diffuse des UVC dans l'appareil et on fait circuler l'air dedans, ce qui neutralise l'ADN des éléments biologiques des aérosols ; et sans effet sur les polluants inertes. Produit un peu d'ozone et nécessite de correctement dimensionner et en complément d'une aération mécanique. A éviter.
- Les UVC externes : On diffuse des UVC dans des espaces sans présence humaine (typiquement les plafonds) et le rayonnement neutralise l'ADN des éléments biologiques des aérosols. Produit un peu plus d'ozone, à éviter.
- Les far-UVC (222nm) : On diffuse des UV exclusivement sur la bande 200-235 nm dans tout l'espace, ce qui perturbe l'ADN des éléments biologiques des aérosols sans altérer l'ADN humain (bloqués par la peau ainsi que les tissus oculaires). Il y a une très faible production d'ozone relativement simple à évacuer mais à ne pas négliger.
Ainsi la grande complexité de ces technologies, et leur coûts réservent la plupart de ces fonctions à des applications industrielles, toutefois certains fabriquant commerciaux utilisent certaines de ces technologies sans mentionner l'effet et la quantité d'ozone que leurs appareils produisent. L'ozone même s'il se dégrade en quelques heure, est irritant s'il s'accumule en trop grande quantité, et ne devrait absolument pas être produit dans des espaces non prévus à cet effet, comme pour des utilisations domestiques.
Enfin du coté de la filtration, deux techniques seulement, elles aussi très souvent cumulées :
- La filtration à charbon (actif) : On fait circuler l'air à travers un filtre composé de petits granulés de charbon poreux. Les gaz, les composés olfactifs et les plus gros composés organiques volatils (CoV) se retrouvent piégés jusqu'à ce que ces granulés soient plein, le filtre devant être remplacé. La perte d'efficacité est de quelques semaines et demande alors un entretient très régulier.
- La filtration particulaire (HEPA et autres normes) : On fait circuler l'air à travers un ou plusieurs filtres de différentes densités de mailles de fibres, amenant les particules à se fixer définitivement sur les fibres. En Europe la norme principe est la norme HEPA (High Efficiency Particulate Air) qui se subdivise en sous-catégories (EPA, ULPA, et encore en sous-niveaux) en fonction de leurs capacité de filtration des particules de taille 0,3µm (les plus difficiles à capturer). Ainsi un filtre de type H13 signifie qu'il a été testé en conditions contrôlées et qu'il a capturé 99,95% des particules émises de taille 0,3µm. Cette norme présuppose que l'ensemble des particules plus grandes mais que seulement une partie des plus petites sont effectivement filtrés. Le remplacement des filtres est fonction de la pollution présente, et plus le filtre est encrassé, plus cela va encombrer le flux d'air et donc réduire la quantité d'air filtré, mais l'air continuera d'être filtré à la même norme qu'initialement : l'encrassement n'affectant in fine que le débit à la baisse. La filtration capture ainsi tout sauf les gaz, odeurs et plus petits composés organiques volatils (CoV), ce qui cumulé à des taux de remplacement annuels et à des prix modiques, une technologie polyvalente et la plus utilisée.
Tableau de l'efficacité de filtration des particules de taille 0,3µm des normes HEPA et de ses sous-catégories.
3. Débit/CADR
Le débit d'air assaini, ou CADR (Clean Air Debit Rate) est la quantité d'air filtré en m3/h (ou cfm pour cubic feet per meter) à une puissance donné (dans le cas d'appareil avec plusieurs vitesses). C'est la valeur définissant l'efficacité réelle des appareils de filtration de l'air, et pour le cas de l'assainissement par rayonnement, il est possible d'établir des équivalences statistiques.
Le risque est le produit de la quantité d'exposition fois le temps d'exposition, moins les capacités de résilience face au polluant ; et chaque risque est spécifique à chaque type de polluant en fonction de ces 3 variables. Ainsi les travailleurs de l'amiante nécessitent d'excellentes protections contre cette fibre de 0,02 à 0,1 µm ; mais est tout aussi dangereuse à des expositions plus faibles puisque cette fibre s'accumule indéfiniment dans les poumons. Sans rentrer dans les détails qui nécessiteraient un article complet, on détermine pour chaque polluant un taux de changement d'air par heure (ou ACH pour Air Change per Hour) nécessaire pour réduire le risque à des niveaux acceptables. Ainsi en France l'ACH pour les salles d'opération chirurgicales et services de maladies infectieuses est de 12, donc ces salles sont équipés de ventilations et systèmes de purification permettant le remplacement/filtration de 12x le volume de ces pièces par heure.
Pour nos usages individuels et collectifs plus classiques, alors que la poussière (0.5 à 1 ACH nécessaire) ou les particules fines issues de la combustion (2 à 3 ACH) sont relativement simples à gérer, le risque le plus courant et nécessitant le plus fort besoin d'assainissement de l'air est celui de la capture les aérosols respiratoires ; donc la tuberculose, la variole, la grippe, la varicelle, la coqueluche (etc.) et surtout le covid.
Les infections respiratoires se produisent lorsque un suffisant grand nombre d'aérosols contenant des virus ou bactéries sont respirés. Environ 30% des infections se font par un flux d'air direct où seul les masques sont efficaces, toutefois les 70% restants sont le produit de l'accumulation des aérosols dans les pièces fermées, produisant ainsi des contaminations à plus longue distance et tant que ces aérosols stagnent dans ces pièces. C'est ce principal mode de transmission sur lequel les purificateurs d'air agissent : en neutralisant les aérosols dans une pièce, on réduit alors ces risques d'infections.
Il existe deux façons de mesurer ce risque très spécifique, soit centré sur le volume à couvrir (la majorité des normes françaises et européennes) ; soit centré sur le nombre de personnes maximal pouvant occuper une pièce (la norme ASHRAE américaine, et quelques autres normes françaises spécifiques).
Ainsi pour le covid, pour réduire le risque d'infection aéroporté - longue distance - de 90% il est nécessaire de produire un minimum de 5 ACH, soit pour un volume donné l'addition du remplacement et de la filtration de 5x ce volume ; tandis que pour la norme ASHRAE il faut produire 68m3/h d'air filtré/remplacé par personne.
Ainsi si vous souhaitez couvrir votre salon de 20m² et de 2,7m de hauteur lors des repas de famille avec 6 personnes et réduire les risques d'infection aéroporté de plus de 90%, vous aurez deux moyens de quantifier les risques et de connaître le dimensionnement acceptable :
- Soit centré sur le volume, donc 20x2,7x5 = 270m3/h de débit d'air filtré/CADR.
- Soit centré sur le nombre de personnes, donc 6x68 = 408m3/h de débit d'air filtré/CADR.
Généralement, la norme centrée sur le nombre de personnes est beaucoup plus intense dans les environnements denses, tandis que la norme centrée sur les volumes s'adapte mieux pour les usages réguliers. Mais dans tous les cas, même une réduction imparfaite est une réduction de la charge virale reçue : si à votre repas de famille il y a 1 nouvelle personnes infectée au lieu de 5, et que cette personne a reçue une moins grande charge virale initiale, c'est autant de risque en moins de complications sévères, dont covid-long. Il existe d'autres subtilités concernant le type d'activité plus ou moins émettrices d'aérosols respiratoires, ou la combinaison de plusieurs outils de réduction de risques tels que les masques ou sprays nasaux, ou encore sur l'acceptabilité du risque qui est elle même dépendant d'une multitudes de facteurs mais tentons de rester simple et le plus généraux dans cet article.
Enfin, les appareils commerciaux annoncent des débits très souvent gonflés en utilisant des protocoles de tests plus favorables, ou en indiquant le débit sans la réduction produite par la résistance des filtres. Divers sites web testent dans des conditions réelles les performances tels que l'américain energystar.gov sur diverses particules : des pollens (~PM10), des poussières (~PM2.5) et des fumées (PM1) ; pensez alors à vérifier les modèles, notamment sur la mesures des poussières car étant d'une taille similaire aux aérosols respiratoires.
4.Bruit
Dans la communauté des fabricant·e·s et utilisateur·rice·s de purificateurs d'air on a coutume de dire qu'"un appareil trop bruyant, c'est un appareil éteint". Comme pour les masques ou les vaccins, il faut prendre en compte l'acceptabilité sociale pour qu'une nouvelle pratique soit acceptée. Le bruit que font ces appareils peuvent être beaucoup trop dérangeant selon les contextes d'usage.
Une discussion calme c'est environ 45db, tandis qu'un repas de famille avec un fond sonore ou une réunion c'est déjà à plus de 52db, dans un bar ou un évènement avec du monde c'est déjà plus de 60db. Les purificateurs d'air qu'ils soient commerciaux ou DIY sont entre 40db et 55db, allant donc d'un bruit de fond léger à un bruit fort nécessitant de hausser la voix. Nos purificateurs d'air DIY fonctionnent avec des ventilateurs de PC extrêmement peu bruyant en comparaison des appareils commerciaux qui fonctionnent avec un unique ventilateur et des vitesses bien plus élevées. Il est recommandé de bien vérifier le bruit produit en fonction du niveau de puissance, plus particulièrement pour les appareils commerciaux où le marketing met en avant le bruit à puissance minimale avec le débit à puissance maximale.
Echelle du bruit avec la représentation d'objets de la vie courante.
5.Prix
Nous nous concentrerons uniquement sur le prix face au débit des appareils. Toutefois il est à noter que certains appareils proposent des fonctionnalités additionnelles tels que la présence de capteurs de particules, un chauffage/climatisation d'appoint etc. ; attention toutefois à ce que ces fonctionnalités ne soient pas des arguments marketing pour multiplier le prix d'appareils aux capacités d'assainissement douteux, voir nocifs (NB : n'achetez jamais d'appareils avec diffuseurs d'odeurs).
Il faut considérer le prix des appareils dans son entièreté :
- Le prix d'achat
- La fréquence de renouvellement des filtres
- La consommation électrique
Le modèle économique des purificateurs d'air grand publique repose sur un appareil vendu à prix coutant, et des marges réalisées sur la vente de filtres spécifiques à leur modèle. Comme il n'y a aucune standardisation sur les dimensions des filtres, les fabricants exploitent ces marchés captifs ainsi produits. Deux méthodes permettent de réduire leurs prix : en achetant des stocks en soldes ou directement chez les fabricants directs que vous pourrez trouver sur aliexpress ; la seconde méthode étant de prolonger la durée des filtres en aspirant régulièrement avec un aspirateur à vitesse minimale et sans utiliser d'eau (pour ne pas abimer les fibres, ni enlever leur potentiel électrostatique) directement sur la surface des filtres.
Sur la fréquence de remplacement, les fabricants annoncent autour de 6 mois, sauf qu'aucun protocole de test n'existe. Par ailleurs tous les environnements ne se valent pas, un atelier de découpe du bois encombrera bien plus rapidement les filtres qu'une maison en pleine nature. Ainsi pour des usages dans des conditions normales nous vous conseillons de doubler systématiquement la durée de vie annoncée par le fabricant. Sur nos modèles, des fréquences de remplacement très précautionneux sont proposés pour correctement estimer les prix, et de futurs protocoles de tests sont actuellement en cours d'élaboration.
La consommation électrique peut véritablement s'envoler sur les appareils commerciaux, et c'est un point qu'il ne faut pas négliger. Prévoyez des usages théoriques de 6 à 12h par jours, de 5 à 7 jours par semaine, et de 150 à 300 jours par an selon les contextes afin d'estimer la consommation énergétique en watt/heure x le prix du kwh. Les modèles DIY reposant sur des ventilateurs de PC extrêmement efficients énergétiquement permettent de diviser par 5 la consommation électrique à débit similaire face aux appareils commerciaux.
Un bon purificateur d'air c'est un appareil qui correspond à vos besoins. Pour des usages grands publique c'est :
- Une filtration HEPA de qualité E12, H13 ou True Hepa
- Un débit d'air filtré par heure supérieur à 5x le volume de l'espace à couvrir
- Un bruit inférieur à 45db dans un lieu calme, et 55db dans un environnement collectif
- Le moins cher possible en prenant en compte le prix des filtres et la consommation électrique
N'hésitez pas à partager cet article comme de poser vos questions en commentaires.